La "taxe carbone aux frontières" désigne le Mécanisme d’Ajustement Carbone aux Frontières (MACF) qui a pour objectif de protéger la compétitivité sur le marché européen d’industries émettrices de gaz à effet de serre (métallurgie, cimenterie, industrie des engrais azotés, de l’hydrogène et de l’électricité), qui verront en parallèle une hausse de la tarification carbone. Cet instrument réglementaire européen est entré en phase de test le 1er octobre 2023. Son fonctionnement sera effectif à partir de 2026.
Cette FAQ et ce replay de webinaire répondent aux dirigeants souhaitant en savoir plus sur ce dispositif. Chacune des réponses apportées s’appuie sur les textes officiels de l’Union européenne (UE) et les publications de la Direction Générale de l’Energie et du Climat. Le lien vers ces textes est systématiquement fourni.
Mon entreprise est-elle concernée par la taxe carbone aux frontières ?
Une entreprise devra s’acquitter de la « taxe » carbone aux frontières si les trois conditions portant sur i) la nature de la marchandise, ii) son origine géographique et iii) le régime douanier de l’importation, sont réunies.
La marchandise importée doit faire partie de la liste des produits visés par le mécanisme.
Une entreprise est concernée si elle importe une marchandise dont le code douanier est listé dans l’Annexe 1 du Règlement 2023/956. Ces codes sont également listés dans deux tableaux synthétiques du guide pratique pour les importateurs de la Direction Générale de l’Energie et du Climat (DGEC, pages 5 et 6). Par exemple, si une entreprise importe de la fonte brute non alliée contenant moins de 0,5 % de phosphore et moins de 1 % de silicium (i.e. code douanier 7201 10 11), elle devra alors s’acquitter de la « taxe » carbone aux frontières.
La marchandise importée doit provenir d’un pays hors UE.
Une entreprise est concernée si la marchandise importée (listée en Annexe 1) provient d’un pays qui ne participe pas au marché européen du carbone (appelé Système européen d’Echange de Quotas d’Emissions, SEQE). Les marchandises provenant d’Islande, de Norvège, de Suisse et du Liechtenstein sont exemptées du MACF car, bien qu’exclus du SEQE, ces pays disposent d’un système de tarification du carbone jugé équivalent (cf. Annexe 3 du Règlement 2023/956).
La marchandise doit être mise en libre pratique sur le marché de l’Union européenne.
Le MACF s’applique aux marchandises (listées en Annexe 1) qui sont importées de pays tiers sous tout régime douanier donnant lieu à la mise en libre pratique sur le territoire de l’UE (cf. DGEC, page 4). La mise en libre pratique signifie que la marchandise importée sera consommée et/ou circulera librement sur le territoire douanier de l’Union. Le MACF s’appliquera également aux marchandises importées sous le régime du « perfectionnement actif », lorsqu’elles sont finalement mises en libre pratique sur le marché de l’UE (cf. guide pour l’importateur de la Commission européenne, paragraphe 4.3.6). En revanche, le MACF ne s’appliquera pas si la marchandise, importée sous le régime du perfectionnement actif, est réexportée hors de l’UE.
Quand s'appliquera le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières ?
- Octobre 2023 : inscription sur la plateforme MACF afin d’enregistrer chaque trimestre la quantité de carbone importée
- 1er janvier 2025 : ouverture des demandes d’autorisation « Déclarant MACF » (demande d’autorisation obligatoire)
- 1er janvier 2026 : début du fonctionnement effectif du MACF avec l’obligation, à partir de cette date, de détenir une autorisation « Déclarant MACF »
Comment calculer le contenu carbone du produit importé ?
Deux textes clés définissent la méthodologie de calcul du contenu en émissions carbone d’un produit.
La méthode de calcul des émissions d’une marchandise est définie à l’Annexe 4 du Règlement 2023/956. Le contenu carbone (appelée « émissions intrinsèques ») d’une marchandise est égal au ratio entre les émissions attribuées au produit et la quantité de marchandise produite à l’origine de ces émissions. Les émissions considérées dans le calcul sont celles résultant du processus de production lui-même (dites « directes ») et celles contenues dans l’électricité consommée lors du processus de production (appelées émissions « indirectes »). Pour les produits semi-finis ou finis (dits « complexes » dans le Règlement), le contenu carbone doit également inclure les émissions incorporées dans les matières consommées au cours du processus de production. Ces matières sont appelées les « précurseurs » dans le Règlement.
En outre, l’Annexe 2 (paragraphe 3) du Règlement d’Exécution du 17 août 2023 de la Commission européenne donne, pour chaque produit visé par le MACF, les informations clés à considérer pour calculer son contenu carbone. Cette Annexe spécifie par exemple les différents types de processus de production et les différents précurseurs à considérer dans le calcul. Le chapitre 5 du guide de la Commission européenne en fait la synthèse. Par exemple, s’agissant de l’acier brut, les modes de production à considérer pour le calcul des émissions sont i) l’aciérie à l’oxygène et ii) le four électrique à arc. Dans le cas d’une production s’appuyant sur cette deuxième méthode, les précurseurs à considérer sont la fonte brute, certains ferro-alliages et l’acier brut d’autres installations (si utilisés dans le processus de production). Les émissions liées aux combustibles, à la consommation d’électrodes et à des matières telles que le calcaire, la magnésite etc. (liste non exhaustive) seront aussi à prendre en compte.
L’information sur le contenu carbone d’un produit importé est à demander à son fabricant étranger.
L’entreprise européenne qui importe un produit soumis au MACF devra demander à son fournisseur hors UE de lui fournir les informations concernant le contenu carbone de son produit (cf. guide de la Commission européenne, paragraphe 4.3.5). Si l’entreprise réalise l’opération d’importation via un intermédiaire, ce dernier devra alors transférer la demande d’informations au fabricant.
La Commission européenne a mis à la disposition des entreprises européennes un fichier Excel qu’elles pourront envoyer directement à leur fournisseur hors UE. Ce fichier est disponible sur la page internet de la Commission dédiée au MACF, dans la rubrique « Guidance ». À noter que les entreprises devront rapporter séparément les émissions directes et indirectes de leurs importations.
La vérification des déclarations MACF par un vérificateur accrédité n’est pas obligatoire durant la phase de transition (du 1er octobre 2023 au 31 décembre 2025) mais le sera à partir du 1er janvier 2026.
Les obligations concernant le rapportage des informations sur le contenu carbone des produits sont assouplies durant la période de transition.
La Commission européenne prévoit des règles souples lors des premières déclarations trimestrielles (rubrique « Key elements », paragraphe 3). À noter que la première déclaration doit s’effectuer au plus tard le 31 janvier 2024 au titre du quatrième trimestre 2023. Pour les trois premières déclarations, i.e. jusqu’au 31 juillet 2024, les entreprises pourront recourir à des valeurs par défaut, calculées par la Commission européenne. Ces valeurs seront disponibles sur le site de Commission en fin d’année 2023. Les conditions pour recourir aux valeurs par défaut se durciront ensuite progressivement. A partir du 1er janvier 2025, seule la méthodologie de calcul du contenu carbone établie par l’UE sera acceptée. En outre, le recours aux valeurs par défaut sera toléré uniquement pour les produits semi-finis ou finis et lorsque ces valeurs représentent moins de 20 % du contenu carbone calculé.
Quel est le prix que mon entreprise paiera pour l’importation d’une tonne de carbone ? Qu’en est-il si mon fournisseur est déjà soumis à une taxe sur le carbone dans la zone où il produit ?
Selon l’article 21 du Règlement 2023/956, le prix d’un certificat MACF (valable pour une tonne de carbone importée) est définie par la moyenne des prix de clôture des permis à polluer (ou quotas) du SEQE la semaine qui précède l’opération d’achat du certificat. Si un pays tiers applique une tarification carbone à ses produits, le déclarant MACF peut demander, lors de sa déclaration, une réduction du nombre de certificats MACF à restituer. Cette mesure, prévue par l’article 9 du Règlement 2023/956, permet ainsi d’éviter que l’importateur paye deux fois une « taxe » sur le contenu carbone du produit. Selon I4CE, 68 mécanismes de tarification explicite du carbone (taxes ou quotas carbone échangeables) existaient mi-2022 à travers le monde. Ses travaux détaillent notamment les mécanismes par pays.
Mon entreprise passe par un intermédiaire pour ses imports : qui devra s’acquitter de la « taxe » carbone aux frontières ?
Selon le guide pour l’importateur de la Commission européenne (paragraphe 4.3.1), l’entité qui aura la charge de s’acquitter du paiement des certificats MACF est celle qui a la charge de la déclaration MACF auprès des douanes. Autrement dit, la charge de la « taxe » revient à l’entité dont l’identifiant EORI (Economic Operator Registration and Identification) est utilisé pour réaliser la déclaration MACF. Si une entreprise a recours à un intermédiaire pour l’importation de produits soumis au MACF, mais que la charge de la déclaration en douane revient à l’entreprise, alors l’entreprise aura également la charge de s’acquitter de l’achat des certificats MACF, et non l’intermédiaire.
Quelles sont les sanctions en cas de manquement aux obligations de déclaration et de restitution des certificats ?
Les sanctions potentielles sont résumées dans le guide de la Direction Générale de l’Energie et du Climat (page 34). En cas de fausse déclaration en douane ou d’écart entre le nombre de certificats restitués et le nombre de certificats effectivement dû, l’entreprise pourrait se voir retirer son statut de « déclarant MACF autorisé ». Ce statut étant indispensable pour importer un produit extra-européen visé par le MACF, son retrait se traduirait par un blocage de la marchandise lors du contrôle en douane. L’entreprise pourrait également se voir infliger une pénalité financière. Les fourchettes indicatives pour le montant de ces pénalités ne sont pas encore connues mais seront précisées dans les actes d’exécution en vue de la période effective.
Votre question n’est pas dans cette FAQ ?
DGEC: questions.macf@developpement-durable.gouv.fr
DGDDI: dg-comint2@douane.finances.gouv.fr
DGTrésor : MACF@dgtresor.gouv.fr