Bpifrance Le Lab pose deux questions à Nicolas Chapelle, entrepreneur et fondateur de WIDOO
"Même si l'échec est beaucoup plus douloureux, on aura toujours cette volonté de ne rien abandonner"
WIDOO est une agence de communication située à Montreuil, en Île-de-France ; Nicolas Chapelle en est le fondateur.
Le Lab : Les entrepreneurs des quartiers créent des entreprises qui ont un aussi bon, voir un meilleur taux de survie que les autres, qu'est-ce qui pourrait l'expliquer selon vous ?
Nicolas Chapelle : "Si les entrepreneurs des quartiers ont une durée de vie un peu plus longue, c’est parce qu’ils font preuve d’une forte détermination. On a la pression des pairs. C’est un peu la honte si on s’est lancé dans un projet et qu’on ne va pas jusqu’au bout. Dans notre culture, les gens vont dire : il s’est brûlé les ailes, ça y est, il rentre à la maison
« la queue entre les jambes ». L’échec n’est pas interdit, mais il est très mal vécu. C’est pour ça qu’on a des capacités à travailler toujours plus, à ne pas assez se payer, à faire des sacrifices et à essayer de gérer comme on le peut. Il n’y a pas de papa-maman pour réinjecter de l’argent en cas de coup dur.
Quand on vient d’une famille nombreuse et/ou d’un milieu modeste et qu’on dit : « bon bah je me lance », tout le monde nous soutient. Beaucoup de gens mettent de l’espoir en nous, en disant : « ça y est, il va changer la famille ». C’est une responsabilité énorme, bien qu’elle ne soit pas exprimée telle quelle, elle pèse sur le mental. Je pense que c’est pour ça que même si l’échec est beaucoup plus douloureux, on aura toujours cette volonté de ne rien abandonner."
Le Lab : Vous nous parliez des réseaux comme élément crucial dans votre quête de clients, qu'en est-il selon vous dans les quartiers ?
Nicolas Chapelle : "Plusieurs réseaux professionnels ont compté dans l’évolution de mon entreprise. Au tout début, j’ai été aidé par l’association « Nos quartiers ont du talent ». Ils m’avaient engagé pour leurs premières plaquettes et cartes de visite. Puis, j’ai intégré le ME93, dont je suis dorénavant au conseil d’administration. Ensuite, j’ai rencontré une agent immobilière qui m’a introduit au Business Network International (BNI), il y onze ans. C’est un réseau international situé dans le quartier de l’Arc de Triomphe à Paris. C’est là que j’ai rencontré des personnes qui d’ordinaire ne font pas partie de mon réseau personnel : des family offices, des gestionnaires de patrimoines, des grands avocats,… Ils m’ont permis d’accéder à leurs réseaux de clients, principalement constitués de grosses sociétés.
J’ai fait pas mal de « réseau business » en banlieue, ce sont des petits projets, qui restent entre petits projets. Comme par exemple quelqu’un qui fait des produits de beauté maison, qui va parler à quelqu’un qui fait des flyers et ils vont se vendre entre eux des flyers et des produits de beauté. On voit vite les limites de ce procédé. Moi aussi, j’étais pareil au début. Puis j’ai compris avec l’expérience que dans le business, il faut absolument voir plus gros.
Ce qu’il manque, c’est une approche de réseau global. Il faut comprendre que l’objectif, ce n’est pas d’essayer de vendre tout de suite son produit, mais plutôt de se constituer un réseau de partenaires, de relais et de clients. Il faut que les entrepreneurs sortent des quartiers pour aller dans des réseaux plus régionaux, plus globaux, plus internationaux et qu’ils réinjectent ensuite leur expérience vers la banlieue."
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