Après avoir analysé les cas de 15 entreprises en transition bas-carbone lors de précédentes études et publié un livre blanc sur l'économie régénérative, Bpifrance le Lab vous propose d’approfondir le concept à travers des cas concrets d’entreprises en transformation. Les auteurs analysent quatre entreprises* souhaitant devenir « régénératives » à la suite de leur participation au parcours proposé par la Convention des Entreprises pour le Climat (CEC).
Si ce n'est déjà fait, Bpifrance Le Lab vous recommande de lire L'Œil du Lab qui définit l'approche régénérative avant les études de cas.
LE MOT DE MATTHIEU BRUNET, CO-DIRGEANT D'ARCADIE :
« Arcadie est une entreprise familiale engagée en faveur de l’agriculture biologique depuis sa création. Les marques d’épices (Cook) et de tisanes (L’Herbier) sont présentes dans plus de 3 000 magasins bio, avec 18 filières et plus de 173 références labellisées « commerce équitable » par BIOPARTENAIRE®. Une centaine de collaborateurs s’impliquent dans l’entreprise afin d’aller toujours plus loin dans le développement d’un modèle d’entreprise agroalimentaire soutenant le monde vivant. Arcadie est aussi une entreprise favorisant l’autonomie et la prise d’initiative à travers la gouvernance en holacratie1 et d’autres approches de management innovantes. »
QU'EST-CE QUI VOUS A MOTIVÉ POUR ADOPTER CETTE TRANSFORMATION VERS LE RÉGÉNÉRATIF ?
« Comme nous étions engagés en faveur du bio et de la santé humaine depuis 1985, nous avions l’impression d’être déjà en avance sur ces sujets. Néanmoins, nous avons senti que quelque chose d’intéressant allait se passer, et c’est cette intuition qui nous a poussés à participer à la Convention des Entreprises pour le Climat, et nous en sommes ravis : nous avons énormément appris sur le caractère irréversible de l’état du monde et surtout sur la nécessité d’adopter une approche systémique pour adresser les enjeux colossaux. Nous avons réalisé notre bilan carbone pendant la CEC, et notre envie de créer des liens locaux plus forts a été renforcée. »
LES ENJEUX DU SECTEUR DE L'AGROALIMENTAIRE ET DU BIO
La production agricole est particulièrement vulnérable aux effets du dérèglement climatique avec des aléas météorologiques plus nombreux et plus extrêmes, le développement de nouvelles pathologies, des tensions sur la ressource en eau, qui perturbent les rendements et les coûts des matières premières.
Ces phénomènes obligent le secteur à accélérer la mise en œuvre de solutions d’adaptation et à rechercher plus de résilience en développant notamment des circuits plus courts et locaux.
De surcroît, le marché du bio fait lui aussi face à de nombreuses difficultés : inflation, baisse du pouvoir d’achat, baisse des assortiments bio en grande distribution, confusion des labels, crise de confiance du bio au profit du local :
Selon une enquête de NielsenIQ, les ventes de produits bio ont reculé de 7,4 % en grandes surfaces en 2022 en France. Pour les enseignes spécialisées comme Biocoop, Naturalia ou Comptoirs de la bio, la baisse serait vertigineuse avec -12 % de ventes…
- Selon une enquête de NielsenIQ2, les ventes de produits bio ont reculé de 7,4 % en grandes surfaces en 2022 en France. Pour les enseignes spécialisées comme Biocoop, Naturalia ou Comptoirs de la bio, la baisse serait vertigineuse avec -12 % de ventes3…
- 200 magasins spécialisés bio ont fermé en 2022 selon le magazine Bio Linéaires.
- Les Français semblent faire de moins en moins confiance à l'appellation « Bio ». En 2022, seulement 5 % de la population française avait confiance dans l'appellation biologique des produits alimentaires, alors qu'ils étaient 70 % en 2008. De plus, 90 % d'entre eux estimaient également.
Illustration de la chaîne de valeur d’Arcadie :
VERS DES FILIÈRES AGRICOLES LOCALES, ROBUSTES ET RÉGÉNÉRATIVES :
1ÈRE ÉTAPE CLÉ : 2014
STRUCTURATION DE LA RSE PAR UNE LABELLISATION
Arcadie a été créée en 1990 par des fondateurs alignés sur une ambition et une éthique visant à prendre soin des Hommes et de la Planète. Celles-ci s’appuient sur des convictions fortes autour de l’agriculture biologique, des conditions de vie des producteurs, des conditions de travail des Arcadiens, des transports, des emballages et d’un commerce juste et durable. En 2014, l’entreprise s’est engagée dans une démarche RSE structurée avec la labellisation BioED4 (Bioentreprisedurable) pour s’évaluer et poursuivre l’amélioration continue de ses pratiques RSE. Ce label RSE issu de la norme ISO 26000 a été co-construit pour et par des PME du secteur du bio, Arcadie participant à l'élaboration du référentiel.
2ÈME ÉTAPE CLÉ : 2017
MODE DE GOUVERNANCE EN HOLACRATIE
Ce mode de gouvernance considère l’organisation comme une entité vivante ayant la capacité de s’auto-organiser, en favorisant notamment une prise de décision décentralisée répartie au sein des équipes. L'adoption de l’holacratie a représenté un virage dans la transformation culturelle de l’entreprise. L’instauration de ce mode de gouvernance a permis de catalyser un déploiement plus puissant de la RSE, grâce à une distribution des responsabilités en lien avec la raison d'être de l'entreprise, et donc la mise en place d'une approche plus systémique, agile et mature permettant d'inscrire pleinement la RSE dans chaque métier.
3ÈME ÉTAPE CLÉ : 2021-2023
PARTICIPATION À LA CEC ET LANCEMENT D’UNE DÉMARCHE VISION AVEC LES PARTIES PRENANTES
Les dirigeants de l’entreprise ont lancé début 2022 un processus en interne destiné à définir la vision à 10 ans de l’entreprise. Ce travail, qui s’est étalé sur un an et demi, a impliqué tous les collaborateurs (administratifs et ouvriers) qui le souhaitaient. Deux chantiers de six mois ont été menés en parallèle : l’un sur l’identité et la culture (définir la raison d'être et les valeurs en lien avec l’histoire de l’entreprise), l’autre autour de l’exploration de grandes thématiques liées à l'environnement, l'humain, l'économie. Ces démarches se sont rejointes et achevées lors de deux séminaires ayant rassemblé tous les collaborateurs et ont abouti à la rédaction d’une vision à 10 ans finalisée par la direction.
LES ACTIONS D’ARCADIE VERS LE RÉGÉNÉRATIF, EN CINQ PRINCIPES
Pour défricher le concept d'approche régénérative, complexe à l'échelle d'une petite ou moyenne entreprise, Bpifrance Le Lab a collaboré avec la Convention des Entreprises pour le Climat et Lumia, un centre de recherche-action sur l'économie régénérative.
VOIR BEAUCOUP PLUS LOIN QUE LE CLIMAT ET INTÉGRER LA COMPLEXITÉ
#1 – ADOPTER UNE VISION SYSTÉMIQUE
Arcadie travaille avec environ 260 matières premières qui n’ont pas la même origine et/ou qui ne sont pas produites de la même manière. La production de ces matières premières représente le premier poste d’émissions de gaz à effet de serre de l’entreprise.
Quel équilibre trouver entre l’impact carbone et l’impact sur la biodiversité ? Qu’est-ce qui serait le « moins pire » vis-à-vis des limites planétaires ? La complexité des enjeux, c’est ce que Bpifrance Le Lab appelle “le paradoxe de vouloir bien faire” et qui explique le cas de la production de tomate bio5.
Afin de répondre à ces questions, Arcadie ouvre un chantier d’analyse de certains produits croisant les impacts de la production sur la biodiversité et sur le carbone. Un travail minutieux de collecte de données est réalisé afin d’objectiver les décisions à prendre : de quelle manière est produite telle plante, où, quelles sont les conditions propices à sa culture, est-ce que cette culture serait envisageable en France, et si oui, à quelles conditions culturales ?
L’objectif de ce travail est de pouvoir intégrer à la politique d’achats responsables des critères de choix supplémentaires aux critères habituels (qualité, prix, origine) : ACV6 du produit, impact carbone et éventuelle relocalisation.
#2 – CRÉER DE LA VALEUR POSITIVE NETTE POUR LES PARTES PRENANTES, LES ÉCOSYSTEMES NATURELS ET LA SOCIÉTÉ
Cette intention est inscrite depuis le départ dans l’ADN d’Arcadie. Un projet peut illustrer concrètement ce principe : l’accompagnement de producteurs malgaches au changement de pratiques culturales.
A Madagascar, la culture de curcuma ou du gingembre se fait traditionnellement sur brûlis. Après quelques années, les terres cultivées sur brûlis devenant infertiles, les producteurs se retrouvent dans la nécessité de trouver de nouvelles terres pour continuer à produire (engendrant souvent la destruction de forêts primaires).
Le projet mené par Arcadie depuis 2019, en partenariat avec l'agence de coopération internationale allemande pour le développement (agence GIZ), vise à :
- Sécuriser des terres agricoles et soutenir économiquement des familles malgaches.
- Accompagner les producteurs d’épices dans le changement de leurs pratiques culturales.
- Sécuriser la production d’épices et d’huiles essentielles, tout en contribuant à la préservation des terres agricoles et forêts locales.
- Soutenir la formation des plus jeunes au métier d’agriculteur.
Arcadie rachète des terres agricoles (environ 500 hectares achetés à ce jour) qu’elle met à disposition d’environ 200 familles malgaches. Deux hectares sont alloués par famille : un hectare pour la culture de rente (de cannelle) et un autre pour la culture vivrière de la famille. Arcadie s’engage à racheter la production des villageois chaque année à condition que certaines pratiques culturales, comme la rotation des cultures ou l’agroforesterie, soient mises en œuvre. Le but est de démontrer qu’il est économiquement possible de vivre dignement en cultivant cette surface, ce qui est le cas : les rendements ont été multipliés par 3 ou 4 grâce à ces nouvelles pratiques.
La valeur créée à travers ce projet permet à la fois la régénération des écosystèmes (terres agricoles, espaces forestiers), la régénération sociale (création d’emplois, génération de revenus stables et équitables) ainsi que la création d’une économie locale tout en établissant des relations de confiance et coopératives.
#3 – ETRE CAPABLE DE SE LIMITER, DE RENINCER
Arcadie n’envisage pas de limiter sa production car son ambition est de générer un impact positif maximal sur les écosystèmes écologiques, à travers l’adoption des pratiques régénératives.
Cette ambition assumée pour la croissance de la production s’accompagne cependant d’une volonté de réduction des émissions de CO2 en valeur absolue. L’objectif est de maîtriser l’impact négatif jusqu'à son seuil résiduel grâce à des actions concrètes, notamment sur le transport, mais aussi de procéder à certains renoncements.
Arcadie s’engage à sourcer de manière durable un approvisionnement compatible avec ce modèle et cette ambition. Quand ceci n’est pas possible, la rupture de stock ou l’abandon de la référence est choisi plutôt qu’un sourcing qui ne respecterait pas les critères.
Le renoncement peut aussi s’appliquer aux enjeux clients : leurs délais de livraison pourraient s’allonger avec le choix d’adopter des modes de transport plus sobres en CO2.
Arcadie se réserve aussi le droit de renoncer à certains partenariats possibles quand ces derniers n’ont pas le potentiel de devenir équitables ou si le fournisseur concerné n’est pas engagé dans la progression de ses pratiques.
A l’avenir, la volonté de baisser l’impact CO2 pourrait amener Arcadie à renoncer au développement de certains produits dont les pratiques et/ou le mode de production ne seraient pas cohérents avec les ambitions RSE de l’entreprise.
SE RECONNECTER AU VIVANT7 TOUT AU LONG DE LA CHAINE DE VALEUR
#4 – RENFORCER LES SERVICES ECOSYSTEMIQUES DE SOUTIEN ET DE REGULATION
Dans le cadre du label « Fair for Life » dans lequel Arcadie est engagée pour certaines références équitables internationales, des critères existent déjà sur la reconstitution des sols. Arcadie mène actuellement une étude sur la filière poivre blanc à Sao Tomé afin de voir dans quelle mesure il serait pertinent d’intégrer des critères du cahier des charges ROC8 aux critères déjà poursuivis, afin d’aller plus loin dans les pratiques culturales régénératives.
EXPERIMENTATION DE DIVERSES PRATIQUES CULTURALES SUR LE SITE DE ST ÉTIENNE DE L’OLM
Depuis 2010, Arcadie s’inscrit également pleinement dans la régénération des agroécosystèmes sur quatre hectares de cultures expérimentales au sein d’un ensemble foncier de dix-sept hectares, où différentes pratiques sont testées : biodynamie, agroforesterie, essais de semis d’arbres, production de compost et apports dans les parcelles, ainsi que des aménagements pour la biodiversité : mares, murets de pierre, nichoirs, zones non fauchées ; mais aussi autour de l’usine : inventaires floristique et faunistique, fauches tardives, plantation de haies, d’un petit verger, implantation de nichoirs et gîtes à chauve-souris…
DEMARCHE BIODISCORE9
Arcadie soutient ses agriculteurs partenaires souhaitant œuvrer au développement de la biodiversité dans les parcelles à travers la démarche BiodiScore, une méthode de calcul créée par des agriculteurs bio pour les agriculteurs bio, dont l’objectif est d’agir sur la restauration et le développement de la biodiversité. Sur la base de plusieurs critères, les producteurs sont encouragés à replanter des haies, mettre en place des mares, enherber les tournières10… Arcadie réfléchit notamment à la mise en place d’incitations financières pour accompagner le développement de ces pratiques, car les premiers résultats des expérimentations menées démontrent que les rendements ne baissent pas même si les surfaces de production sont moindres (du fait d’une plus grande biodiversité sur la parcelle, et d’une plus grande infiltration de l’eau dans les sols). D’ici à 2025, l’idée est d’étendre le calcul de ce score à l’ensemble des filières équitables et des exploitations “partenaires directs” et de déployer par la suite les actions permettant d’améliorer ce score.
#5 - CHERCHER UN EQUILIBRE ENTRE PERFORMANCE ET ROBUSTESSE
Avant d’arriver en France, environ 50% des épices d’Arcadie transitent par voie maritime dans des conteneurs chargés sur des cargos. Arcadie travaille sur un projet de navire- porte-conteneurs à voiles et a créé pour ce faire une coopérative maritime baptisée Windcoop dans le but de transporter les épices provenant de Madagascar de manière beaucoup plus décarbonée. Le projet permettra de réaliser des économies d’énergie maximales et d’avoir une autonomie de manutention (c’est-à-dire un navire équipé de grues pour décharger lui-même ses conteneurs). Ce nouveau mode de frêt à voile augmente l'autonomie de l’entreprise tout en renforçant la cohérence de sa chaîne de valeur. Le transport maritime à voiles permet d’éviter des hausses de coût brutales, de réduire la dépendance aux énergies fossiles et de bénéficier d’un taux de fret plus stable (seule une partie du coût restant indexée sur le prix du carburant). Le voilier-cargo, un bateau de 85 mètres de long, permettra de réaliser jusqu’à 60% d’économies d’énergie fossile sur le trajet en provenance de Madagascar. Comme les transports représentent le second poste d’émission de gaz à effet de serre de l’entreprise, le projet Windcoop permettra à Arcadie de renforcer son autonomie énergétique, la résilience de son modèle économique et d’offrir un mode de transport plus aligné avec ses objectifs climatiques.
Le projet Windcoop, avec son modèle coopératif et l’assurance des bonnes conditions de travail pour les futurs équipages, permet également de contribuer à la régénération sociale.
#6 - UTILISER DES MOLECULES BIO-ASSIMILABLES
L’agriculture biologique est par essence une production favorisant l’utilisation de molécules bio-assimilables11. La matière première est par définition de la matière organique.
Les encres des emballages d’Arcadie sont sans solvant et l’objectif, d’ici à 2030, est de supprimer le plastique consommable, non bio-assimilable, avec par exemple des emballages réutilisables.
TRANSFORMER EN PROFONDEUR SON MODÈLE ÉCONOMIQUE
Le modèle actuel d’Arcadie repose sur la production et la distribution d’épices et plantes aromatiques et médicinales, soit produites directement (très faible proportion), soit produites par un réseau d’agriculteurs partenaires à travers le monde.
A ce jour, Arcadie ne souhaite pas sortir de la logique volumique. L’entreprise a l’ambition que ses produits contribuent au développement d’un modèle d’agriculture vertueux, biologique et régénérant pour les écosystèmes (même si cela est pour l’instant difficile à mesurer) :
- En développant son activité ou ses achats de matières premières agricoles bio, Arcadie accompagne et favorise la transformation des parcelles cultivées de manière conventionnelle en parcelles à visée régénérative;
- En soutenant la sensibilisation des clients à une alimentation saine et responsable à travers ses produits, mais aussi en témoignant de sa démarche, Arcadie contribue également à transmettre et diffuser des savoir-faire engagés en matière de transition environnementale et sociétale.
#7 - RÉDUIRE DE MANIÈRE DRASTIQUE L’UTILISATION DE MATIÈRES PREMIÈRES ET DE L’ÉNERGIE
Arcadie est bien consciente qu’une entreprise aura toujours, malgré ses efforts, des impacts négatifs incompressibles liée à son activité. L’objectif de la démarche de réduction des émissions carbone est d’arriver au seuil incompressible des impacts négatifs, via aussi le déploiement des pratiques d’évitement en lien avec les parties prenantes (émissions évitées) et de contribution. Plusieurs actions dans ce sens avaient déjà été initiées avant le parcours CEC par Arcadie.
ACTIONS DE RÉDUCTION DE LA CONSOMMATION D’ÉNERGIE ET DES ÉMISSIONS DE GAZ À EFFET DE SERRE (GES) POUR VISER LE SEUIL INCOMPRESSIBLE DES EXTERNALITÉS NÉGATIVES12
Le premier bilan carbone a été réalisé pendant la CEC. Il a mis en exergue les deux postes les plus impactants en matière de gaz à effet de serre :
- La production des épices et aromates, soit l’impact de l’agriculture;
- Le transport, notamment les distances parcourues par les matières premières et le choix du mode de fret.
Afin de réduire l’impact des transports, plusieurs actions sont en cours de réalisation :
- Mise à flot du premier voilier cargo d’ici 2025;
- Engagement dans le programme FRET2113 pour diminuer les émissions liées aux transports aval.
Ce bilan carbone étant calculé à partir de données génériques, le prochain chantier consistera à affiner la mesure des émissions à partir d’Analyses du Cycle de Vie (ACV) pour mieux cibler les actions et évaluer les progrès.
RÉDUCTION DE LA QUANTITÉ DE MATIÈRE CONSOMMÉE
Arcadie s’est fixé pour objectif de supprimer les emballages plastiques consommables d’ici à 2030 et de réduire drastiquement la quantité de plastique utilisée dans toute la chaîne de production. Pour cela, plusieurs réflexions ont été engagées ou sont en cours, comme :
- La suppression des flacons 230-500 ml en PET et le passage à des sachets en papier et recyclables, action réalisée au 1er mars 2024;
- Le développement d’emballages consignés (produits finis et vrac),
- La sensibilisation des fournisseurs à des emballages moins impactants (recyclables, plus légers voire réutilisables (Bigbags)...),
- La sensibilisation des clients à des formats de produits différents et leur accompagnement dans l’usage,
- La substitution ou la limitation du plastique à tous les niveaux (par ex : dans le choix des produits de nettoyage pour le process, dans la sécurisation et le stockage des palettes, l'emballage des fournitures et équipements divers,...
- L’intégration d’un critère lié à la diminution des déchets dans le calcul de la prime d'intéressement des salariés, aux côtés d’un indicateur carbone et de l'indicateur financier.
#8 – ÊTRE CIRCULAIRE PAR DESIGN
Arcadie a pour objectif que 100% de ses produits soient vendus dans des emballages consignés, que ce soit pour les produits finis ou pour le vrac. Pour rendre cela possible, l’idée consiste à relocaliser au maximum le circuit de distribution dans un rayon de 350 km. Ceci permettrait de travailler en partenariat avec les réseaux de consignes qui se chargent du nettoyage, de la récupération et de la réutilisation des emballages d’Arcadie (principalement en inox et fabriqués en France).
Arcadie fabrique également du compost à partir de ses propres rebuts organiques. Ce compost sert à nourrir les cultures expérimentales, mais aussi à sensibiliser différents acteurs du territoire sur le rôle précieux du compost dans l'apport des nutriments et de la vie des sols.
#9 ÊTRE ANCRÉ DANS LE LOCAL
Le parcours CEC a représenté un accélérateur pour Arcadie en faisant apparaître l'urgence et la nécessité de questionner le modèle économique et la vision de l'entreprise. Les équipes ont ainsi souhaité développer la relocalisation des activités et l’ancrage territorial.
1er objectif : Relocaliser en France la production de plantes aromatiques et d’épices chaque fois que cela est possible et pertinent. Comme évoqué au paragraphe #1, une étude est en cours afin de déterminer quelles cultures pourraient s’adapter, et selon quel mode de production.
2ème objectif : Renforcer l'ancrage local :
- Développer la vente aux consommateurs, en sortant du réseau de distribution bio, sur un périmètre de 350 km autour de son siège (tous magasins alimentaires locaux, grossistes locaux…).
- Développer les ventes aux professionnels : restauration collective, restaurants, via des grossistes spécialisés.
- Développer les visites du site d’Arcadie, l’accueil de différents publics.
- Participer à plus d'événements (salons) ou de démarches locales.
Arcadie contribue par exemple au Projet Alimentaire Territorial de l’Agglomération d’Alès à travers différentes actions pour :
- Soutenir les producteurs dans la mise en place d’actions concrètes et collectives en matière d’agroécologie,
- Créer des fermes pédagogiques comme outil de médiation et de sensibilisation au monde agricole,
- Soutenir l’animation d’ateliers pédagogiques à destination des enfants (de 0 à 18 ans).
DÉVELOPPER UNE GAMME DE PRODUITS OU SERVICES COMPATIBLES AVEC LE VIVANT
#10 - ÊTRE SOBRE ET MULTIFONCTIONNEL
La sobriété en énergie et en matières premières est au cœur des valeurs d’Arcadie. Par exemple, un bâtiment a été conçu et construit selon les principes du bioclimatisme14. 30% de l’électricité consommée est produite via la centrale photovoltaïque installée sur le toit des bâtiments (1000m2). Plusieurs ACV15 de produits sont également en cours de réalisation.
#11 CRÉER DES RELATIONSRÉCIPROQUES ETCO-ÉVOLUTIVES BASÉESSUR LA COOPÉRATION
Chez Arcadie, 38% des volumes de matières premières sont issus du commerce équitable qui, par définition, vise l’équité et permet une juste rétribution des producteurs. L’objectif est d’atteindre 100% en 2030. Une charte d’achats responsables est également en cours de formalisation afin de favoriser encore plus les approvisionnements en provenance de fournisseurs engagés et responsables.
A ce titre, afin d’inciter ses parties prenantes externes volontaires à adopter des pratiques plus vertueuses, Arcadie a l’intention de leur proposer d’être sensibilisées aux enjeux climatiques avec, par exemple, l’animation de la Fresque du Climat.
En parallèle, une réflexion est menée sur les meilleures façons de sensibiliser le consommateur à évoluer vers une cuisine plus saine. La nouvelle stratégie de marketing et de communication vise à :
- Rendre les consommateurs plus acteurs d’un monde désirable.
- Développer les canaux d'interactions directes avec les consommateurs pour les sensibiliser plus fortement et faire valoir la mission de l’entreprise.
PLACER L’HUMAIN AU CŒUR DES TRANSFORMATIONS
#12 PARTAGER LA VALEUR MONÉTAIRE AVEC SES PARTIES PRENANTES ET POUR L’INTÉRÊT GÉNÉRAL
Arcadie envisage de changer de statut juridique afin de renforcer le lien et le partage de la valeur avec l’ensemble de ses parties prenantes et pour l’intérêt général en passant d’une SA16 à une SCIC17. Ce changement permettrait d’intégrer à la gouvernance de l’entreprise l’ensemble des parties prenantes : salariés, producteurs, distributeurs, consommateurs…et donc d’accueillir une vision plus riche et partagée des enjeux à adresser. Par ailleurs, le statut SCIC prévoit un partage du capital avec ses membres et place le bien commun au cœur de la stratégie d’entreprise, même s’il ne suffit pas à garantir un équilibre des pouvoirs.
Le calcul de la prime d’intéressement est en cours d’évolution afin d’inciter les salariés à des initiatives éco-innovantes. Elle sera basée sur des indicateurs économiques et des critères environnementaux.
Parmi les pistes de travail, Arcadie a l'intention de réfléchir à un système de solidarité avec les agriculteurs qui pourrait par exemple prendre la forme d'un fonds de soutien aux aléas climatiques, abondé à hauteur d'un pourcentage du chiffre d’affaires, avec pour contrepartie des engagements de la part des agriculteurs pour la préservation de la biodiversité.
#13 CRÉER DES RELATIONS VIVIFIANTES18
L’entreprise est très soucieuse de ses parties prenantes externes et internes.
Dans ses principales zones de production, l’entreprise agit auprès des populations locales en contribuant à la reforestation et à leur sensibilisation à la préciosité de la ressource en bois, très utilisée à Madagascar pour les besoins essentiels comme celui de se chauffer. Des essences provenant des forêts primaires sont plantées et les agriculteurs sont incités à veiller au développement des jeunes plants. La formation des agriculteurs est également assurée par des formateurs locaux, ayant eux-mêmes changé leurs habitudes de culture par le passé. Toute une économie circulaire locale est en cours de développement. Par exemple, les chaudières de la distillerie permettant de produire l’huile essentielle sont alimentées par des chutes de bois des essences qui y sont distillées.
Autre exemple, malgré une baisse de six millions de son chiffre d’affaires depuis deux ans, la rentabilité demeure correcte et aucun licenciement n’a été enregistré, seuls les départs n’ayant pas été remplacés. L’entreprise s’est adaptée grâce à un fonctionnement basé sur la transparence envers ses fournisseurs, l’autonomie et l’implication de l’ensemble des salariés.
Le travail sur la vision à 10 ans a été mené par des salariés et a permis de nourrir le sentiment d’appartenance, le besoin de sens et l’esprit d'aventure collective. Cette expérience a également renforcé la transversalité et l’autonomie des salariés. Début 2022, un groupe de salariés d’Arcadie, dont un certain nombre d’ouvriers, a planché sur le sujet “Identité et Valeurs de l’entreprise”. Ils ont abouti à la définition d’une raison d’être, sans les dirigeants : “Goûter à l’aventure d’un monde juste”. Ce travail a été vécu comme un cadeau pour le dirigeant, qui a reconnu les engagements et missions de l’entreprise au travers de ces mots. Ils ont également énoncé les valeurs les plus vivantes dans l’entreprise : “Se rencontrer. Œuvrer avec audace. Agir pour la Terre”.
Un des piliers de la nouvelle stratégie porte sur les relations d’Arcadie avec ses parties prenantes internes, intitulée « Se rencontrer, créer des liens plus denses avec toutes les parties prenantes ». Cette action vise entre autres à accueillir plus de stagiaires, d’alternants ou de personnes en réinsertion, à permettre aux salariés de visiter un client ou un producteur ou encore à permettre aux salariés de prendre un congé sabbatique d’un an pour s’investir dans une association de leur choix.
NOTES ET RÉFÉRENCES
1 L'holacratie est une forme de management constitutionnel et de gouvernance fondée sur la mise en œuvre formalisée de modes de prise de décision et de répartition des responsabilités communs à tous dans une constitution. Pour en savoir plus sur la gouvernance et l’interview de Matthieu Brunet, se référer à l’étude Bpifrance Le Lab La gouvernance des PME-ETI, levier de performance et de confiance, pages 56, 68, 128, 146 (février 2020).
2 https://nielseniq.com/global/fr/insights/analysis/2022/bio-et-vrac-victimes-potentielles-dun-pouvoir-dachat-en-baisse/
3 Données fournies par les enseignes
4 BioED, label RSE créé dès 2014 pour les entreprises bio alimentaires et cosmétiques
5Les dirigeants de PME-ETI face à l'urgence climatique - BPI Le Lab (bpifrance.fr). Page 37
6 ACV : analyse de cycle de vie
7 Qu’est-ce que le vivant? Le vivant correspond ici à tous les niveaux de complexité de vie sur Terre, de l’infiniment petit (cellules, bactéries..) à des niveaux plus grand tels que les organismes végétaux, les animaux, les écosystèmes naturels et jusqu’à l’ensemble des grands écosystèmes de la Terre (ou biomes) et la biosphère (ensemble de la vie sur Terre). La biodiversité (ou diversité de la vie) englobe la diversité des milieux naturels, des espèces végétales et animales, dont les êtres humains en font aussi partie. C’est la vie, où tous les organismes sont reliés et interdépendants, en interaction permanente et en équilibre dynamique.
8 La certification Regenerative Organic Certification (ROC) est un des cahiers des charges attestant de pratiques d’agriculture régénérative.
9 Biodiscore: https://biodiscore.bio/
10 Endroit où les tracteurs tournent en bout de parcelle, partie souvent à nu
11 Bio-assimilables signifie que toutes les molécules peuvent être transformées ou assimilées par des processus naturels sans générer de pollution, ou de nouvelles entités dans l’environnement (Nouvelles entités, une des limites planétaires dépassées).
12 La notion de seuil incompressible signifie réduire à leur seuil minimal les émissions de GES. Cela implique de s’aligner sur les prescrits de la science en termes d’impacts négatifs résiduels admissibles. Par exemple, pour le carbone et dans la perspective de rester sur une trajectoire de réchauffement de 1,5°C en référence à l’accord de Paris, il faut en moyenne réduire de 42% les émissions de CO2 entre 2020 -2030 et les réduire de 90% entre 2020 et 2050,).
13 Lien vers FRET21
14 Conception bioclimatique désigne une construction qui tire le meilleur parti de son environnement, son exposition solaire afin d'obtenir un habitat plus économique en dépenses de énergétiques mais également écologique
15 Analyse de cycle de vie
16 Société anonyme
17 Société Coopérative d’Intérêt Collectif
18 Des relations vivifiantes favorisent l’expression du potentiel de chacun, l’inclusion, la diversité et la cohésion des parties prenantes.