Romain Ferrari réagit à l'étude
Et nous livre sa perception et pratiques de la RSE au sein de son entreprise
Le Lab : Quelles sont vos réactions par rapport à l’étude RSE ?
Romain Ferrari : “Cette étude est très intéressante dans l’expression des résultats, par la diversité énorme, et par des messages inverses, avec des situations paradoxales. Paradoxales, parce que sous l’angle négatif, le sujet “fait peur”, il a une connotation “grandes entreprises”, un peu hypocrite, un peu de faiblesse (en termes de rentabilité et de performance) ; ça, c’est le côté négatif, exprimé dans un certain nombre de réponses. En contrepartie, on trouve des messages très positifs ; c’est le territoire des PME et des ETI qui décrit le mieux la nature même et la performance qui découlent de la démarche RSE. Peut-être parce que ce sont des entreprises qui sont plus proche du sens, dont la taille privilégie la qualité des relations en interne et en externe ; c’est un territoire d’entreprises de “bon sens”. Et finalement, on trouve les deux lots de messages, à la fois négatifs et positifs, et c’est la vraie richesse du résultat de cette étude.
On peut le mettre en regard avec la même étude que l’on aurait fait sur les Grandes entreprises ; dans celles-ci, le message semble plus binaire. Il y a celles qui s’en occupent pas du tout très consciemment, et celles qui s’en occupent. Et souvent, celles qui s’en occupent le font avec des moyens de communication très forts, axés sur une posture morale, qui peut parfois laisser à désirer. On a quelque chose de plus simple, et de nettement moins riche dans le territoire des Grandes entreprises en général.”
Le Lab : La RSE, pourquoi ? Comment ? Quels bénéfices ?
Romain Ferrari : “Chez Serge Ferrari, la RSE est quelque chose qui est très ancrée dans le développement dans l’entreprise. Pour notre entreprise, il faut rappeler que nous sommes à la croisée des chemins. Nous sommes une entreprise : Industrielle, de taille intermédiaire, familiale, de capital ouvert !
Donc, il faut s’adresser à un panel d’interlocuteurs très différents sur ce sujet là. Il faut l’adresser et en parler de façon très diversifiée. Surtout, à mon avis, il ne faut pas se payer de mot sur le sujet. Vous savez, ce que les gens partagent le plus quand ils parlent d’une entreprise, ce sont finalement les choses très simples ; d’une part le bilan, et d’autre part le compte d’exploitation. Le bilan est une vision patrimoniale, et le compte d’exploitation est une vision de performance et de valeur ajoutée.
Quand on parle de RSE, ce n’est pas la peine de changer de registre. On peut tout à fait le garder, pour ne pas créer un traumatisme de langage. Du côté patrimonial, il suffit d’étendre la notion “d’actif” aux actifs humains et environnementaux, lorsqu’on parle habituellement des actifs financiers et techniques. On étend donc au capital humain, et au capital environnemental. Et de la même façon, on explique que ce capital peut s’apprécier et se déprécier selon les choix et les décisions que l’on prend.
Du côté de la valeur ajoutée, la RSE peut créer de la richesse ; elle peut créer de la valeur ajoutée en interne (la motivation et le sens que l’on donne au travail, la qualité des relations), et sur le marché (pricing power : les produits pourront être mieux prescrits, ce qui crée de la valeur ajoutée).
Je pense qu’il est important de rester sur ce langage ; pour Serge Ferrari, ce sont des investissements lourds. Nous avons été en 1974 la première entreprise à mettre en place un système d’intéressement sur tous les collaborateurs, y compris de production. Et en 1974, cela n’existait même pas ! Et cela a un coût ; dans les années 2000, nous avons développé une activité de recyclage avec un investissement très lourd : plus de dix millions d’euros d’investissement. C’est une division qui n’est pas rentable aujourd’hui, bien que l’entreprise le soit.
Ce sont des vrais coûts, donc si on n’est pas capable d’exprimer aussi la valeur ajoutée de ses engagements RSE, on quitte le débat et on peut être remis en cause sur ses choix ; et c’est cela qui me paraît très important. Alors certes, c’est une vision peut-être utilitariste, et d’autres mettraient en avant une démarche plus personnelle, beaucoup plus politique, beaucoup plus éthique… Mais en fait les deux démarches sont parfaitement compatibles. Et cela fait aussi partie de la richesse du territoire des PME et des ETI, que de pouvoir proposer un discours relativement large et divers sur le sujet.”
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