Avant-propos d’Oliver Torrès, parrain de l’étude Bpifrance Le Lab « Vaincre les solitudes du dirigeant »
Bpifrance Le Lab vous propose de découvrir l’avant-propos d’Olivier Torrès, le parrain de l’étude « Vaincre les solitudes du dirigeant », la plus important jamais réalisée sur ce thème. Olivier Torrès, membre du comité d’orientation de Bpifrance Le Lab, est le fondateur d’Amarok, premier observatoire de la santé des dirigeants de PME et des entrepreneurs. Il est aussi professeur de management à l’Université Montpellier 1 et à Montpellier Business School.
La solitude, un compagnon de route de l’entrepreneur
"Que les affaires soient prospères, les amis affluent. Que les problèmes viennent, l’entourage se dissipe. Que les difficultés s’amplifient, la solitude règne."
Oliver Torrès : “La solitude est un sentiment variable, sensible au contexte présent. Mais une chose est sûre. La subir est toujours pathogène. La solitude est insidieuse lorsqu’elle s’insinue dans le sommeil du dirigeant où ses problèmes quotidiens hantent ses nuits. Combien de témoignages ai-je entendu de dirigeants avouant dormir avec un carnet pour noter, au sursaut d’un réveil nocturne, la solution au problème qui tournait en boucle dans leur tête toute la nuit.
La solitude, c’est passer des nuits blanches à broyer du noir. Les problèmes de trésorerie, la baisse de l’activité, la perte d’un gros client, l’impayé qui arrive au pire des moments, le salarié que l’on côtoie de longue date et que l’on doit licencier… voilà autant de stresseurs qui amplifient le sentiment de solitude des dirigeants.
Et que dire de l’intensité de la solitude du chef d’entreprise lorsqu’il est convoqué au tribunal de commerce pour liquider son entreprise ? Ce jour-là, c’est souvent un monde qui s’écroule, parfois une dynastie familiale qui s’effondre. La souffrance est telle que certains commettent l’irréversible.
La solitude des entrepreneurs s’amplifie lorsqu’ils doivent faire face à un environnement de plus en plus complexe, et quand le sentiment de responsabilité se mue en sentiment de culpabilité. En petite entreprise, point de DRH qui peut faire tampon. Le management est frontal. Le dirigeant est en butte directe et permanente avec des problèmes de tous types. Il doit assumer seul les conséquences angoissantes de certaines décisions.
La solitude est l’un des traits des décideurs, surtout lorsqu’il s’agit de prendre des décisions importantes. s. Or, « en PME, tout est stratégique » disait Michel Marchesnay, l’un des grands maîtres PMistes français. C’est là l’un des traits spécifiques des entreprises de moindre taille. Les stresseurs évoqués plus haut ((la perte d’un client, l’impayé, le licenciement d’un salarié…) sont marginaux et secondaires en grande entreprise. Ils deviennent majeurs et cataclysmiques dans les plus petites. La solitude accompagne les dirigeants de PME tout au long de leur vie.
C’est pour cela que cette étude est cruciale pour éclairer ce phénomène typiquement PMiste. En me confiant la supervision de cette étude, Bpifrance et son Directeur général, Nicolas Dufourcq, m’ont fait un beau cadeau ; celui d’appréhender l’un des phénomènes psychologiques les plus complexes du management des PME, phénomène souvent évoqué mais rarement abordé par la recherche scientifique. Et les moyens mis en œuvre sont à la hauteur du challenge. Cette étude est en effet inédite par son ampleur – 2 400 dirigeants formant un échantillon représentatif sur le plan national – et par sa méthodologie mixte – combinant l’analyse qualitative des discours et des verbatim de témoins éclairés et l’analyse quantitative qui esquisse avec précision des données chiffrées qui ont ici une force à la fois statistique et épidémiologique.
On retiendra la justesse de la typologie des sept formes de solitude. Cette typologie mériterait d’être reprise par la recherche pour en tester la robustesse. Les propose retenus sont lumineux et peuvent se retenir comme autant de leçons de management.
Cette étude, fort opportunément, invite aussi à promouvoir les antidotes à la solitude ; par bonheur, ils sont nombreux. « Savoir s’entourer », « Adhérer à des réseaux », « Faire de la stratégie » pour sortir le nez du guidon, « Constituer des comités de pilotage », « Partager les décisions », « Ouvrir le capital », « Se former » … sont autant de recettes complémentaires dont l’étude montre les doubles vertus, à la fois pour la santé du dirigeant et la santé de l’entreprise. Le style de management participatif, la nature du leadership charismatique, le type de gouvernance ouvert, la stratégie collaborative, sont au cœur des réponses apportées par cette étude.
On voit alors se dessiner les contours d’une PME, moins classique, plus managériale, donnant plus de poids aux procédures, à la planification, à la gouvernance élargie, au long terme, à la mise en place d’une stratégie globale incluant les parties prenantes…
Cette étude intéressera tout autant les chercheurs en management, spécialisés en entrepreneuriat et PME que les dirigeants de PME eux-mêmes. Que chacun puisse tirer profit de ce travail car il est d’intérêt général. Je voudrais enfin en conclusion, remercier vivement David Targy et Philippe Mutricy pour le travail qu’ils ont réalisé durant ce beau projet ainsi que les membres du comité de pilotage qui nous ont accompagnés durant ce travail.”
Olivier Torrès, parrain de l’étude, fondateur d’Amarok, professeur à l’Université de Montpellier 1 et Montpellier Business School, membre du Comité d’Orientation Bpifrance Le Lab
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