Bpifrance Le Lab a mené une étude inédite sur la transmission et la reprise d’entreprise en partenariat avec CCI France, CMA France et le C.R.A, et a interrogé près de 5 000 dirigeants de TPE, PME et ETI françaises. Parmi eux, près de 1 500 cédants potentiels (i.e. dirigeants ayant l’intention de transmettre leur entreprise) et 2 000 repreneurs (dirigeants ayant repris leur entreprise). Pour compléter les résultats de l’enquête, Bpifrance Le Lab a réalisé 51 entretiens auprès de dirigeants et d’experts de la transmission d’entreprise.
Dans un contexte de vieillissement des dirigeants, se préparer collectivement à la transmission est essentiel pour préserver les savoir-faire, la compétitivité, les emplois et le dynamisme des territoires : 3 millions d’emplois seraient concernés d’ici 2030.
En 2024, seules 26 000 entreprises d’au moins 1 salarié ont été transmises, contre un potentiel de 74 000
Au rythme actuel, seules 130 000 TPE-PME-ETI seraient effectivement transmises dans les cinq prochaines années. Le potentiel d’entreprises à transmettre est ainsi près de trois fois plus élevé que la réalité observée aujourd’hui.
Toutes les transmissions envisagées n’auront donc pas lieu, ou tout du moins pas à cet horizon. 80 % des cédants potentiels envisagent de rester plus longtemps à la tête de l’entreprise plutôt que de la fermer, s’ils n’arrivaient pas à transmettre leur entreprise en temps voulu.
La transmission d’entreprise ne se résume pas à une intention : elle se heurte à des freins psychologiques, un manque d’anticipation et des difficultés à trouver le bon repreneur
« Ce n’est pas parce qu’un potentiel cédant déclare vouloir transmettre son entreprise que celle-ci est réellement prête à être reprise. »
Ariane Olive, avocate et co-fondatrice de Spark avocats
La préparation peut être plus longue qu’initialement prévu : le dirigeant doit se préparer psychologiquement à céder l’entreprise, et parfois faire son « deuil ».
De plus, les cédants sont souvent mal préparés. Lorsque la transmission est prévue dans plus d’un an, 70 % des dirigeants n’ont pas entamé la préparation ou n’en sont qu’au stade de la réflexion. « On observe qu’une période de 12 à 18 mois minimum est nécessaire pour un processus de transmission fluide », souligne Frédéric Vincent, président de l’association Cédants et Repreneurs d’Affaires (C.R.A).
Pourtant, la transmission d’entreprise est une étape très importante et naturelle dans la vie d’une entreprise et du dirigeant. Elle nécessite une préparation minutieuse et sérieuse, qui exige souvent plusieurs années pour mener à bien toutes les étapes clés : bilan personnel, choix du mode de cession, valorisation de l’entreprise, élaboration du dossier de présentation, recherche du bon repreneur, négociation et signature de l’acte de cession...
La manque de repreneurs et des offres de reprise à un prix jugé trop faible sont les principaux obstacles cités par les cédants potentiels (19 % et 18 %). Au-delà du prix, le dirigeant est particulièrement soucieux de garantir la pérennité de son entreprise et de préserver les emplois. C’est le critère le plus important pour 48 % des cédants, devant les qualités humaines du repreneur (40 %) et ses compétences (38 %). Ainsi, l’alignement du repreneur avec la vision pour l’entreprise est essentiel, tout comme la relation de confiance entre les deux parties.
L’accès au financement constitue le principal frein pour les repreneurs
« La probabilité de la réussite et de la pérennité d’une entreprise reprise est plus importante qu’une création. Le seul obstacle à franchir c’est de trouver les fonds nécessaires pour une reprise. »
Slimane Haddadj – Professeur d’université, Université Bourgogne Europe
Véritable alternative à la création d’entreprise, la reprise est un parcours intense et exigeant : plus de la moitié des repreneurs ont rencontré au moins un obstacle significatif pour reprendre. Le financement du projet peut s’avérer particulièrement bloquant. C’est le premier obstacle cité, quel que soit le mode de reprise, et plus fortement chez les repreneurs salariés : 44 % d’entre eux ont éprouvé des difficultés pour trouver les financements nécessaires, contre 23 % des repreneurs familiaux et 30 % des repreneurs externes.
Il est important de reprendre au juste prix et de trouver un financement adapté. Après-coup, environ un tiers des repreneurs ont dû reporter voire diminuer les investissements nécessaires au bon développement de l’entreprise en raison des charges financières liées à l’emprunt ayant servi à financer la reprise. La majorité des reprises tiennent toutefois leurs promesses : 70 % des repreneurs ont atteint, cinq ans après la reprise, les objectifs qu’ils s’étaient fixés.
Les cédants et repreneurs éprouvent des difficultés à se rencontrer
Alors que 23 % des cédants potentiels (hors transmission familiale et aux associés) perçoivent l’absence d’offre reprise comme l’un des principaux obstacles en vue de leur transmission, les repreneurs externes rencontrent également des difficultés pour trouver l’entreprise à reprendre (22 %).
Plusieurs facteurs peuvent expliquer ce décalage, parmi lesquels l’opacité du marché de la transmission, reposant encore largement sur le bouche-à-oreille, et l’importance pour le cédant de trouver un repreneur de confiance, qui partage ses valeurs et sa vision pour l’entreprise.
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Un nouveau profil de cédant émerge, plus jeune et avec un besoin de se renouveler
Alors que près des deux-tiers des intentions de transmission sont déclenchées en prévision d’un départ en retraite, la majorité des transmissions observées sont initiées par des dirigeants de moins de 60 ans. Un nouveau profil de cédant émerge, plus jeune, souhaitant transmettre son entreprise soit en raison d’une charge de travail ou psychologique trop importante, soit par volonté de « changer d’air ». Quatre autres profils de cédants sont mis en lumière dans l’étude.